dimanche 10 avril 2016

Spotlight or the power of investigative journalism

"It's very hard to say no to God," explains the victim of a "paedophile" priest, interviewed by a journalist from the Boston Globe as part of the Spotlight investigation team, which gives the title to Tom McCarthy's film released in US-theatres this January 27th, 2016 and which can be seen all around the globe.
An impeccable Hollywoodian  film that recreates as closely as possible the investigation led by these journalists on a very sensitive issue: the protection offered for thirty years by the Cardinal Archbishop of Boston, Bernard Law, to the priests of his diocese, perpetrators of sexual abuse of children. If in 2003 the Spotlight journalists obtained the Pulitzer Prize for their investigation, the film about their feat has won 9 awards to date, starting with the Oscar for best film, and will certainly obtain others, at the next Cannes Festival, for instance.
To attack the most vulnerable
Religion and sex, two taboos, which supposedly has nothing to do with each other. Whenever they meet, the result is explosive. The "civilized" world, which is so shocked by the primitive barbarism of "Jihad alnnikah" [gender jihad] of the "Islamic State" is struggling to confront his own turpitude, such as those misnamed paedophile priests. Paedophile means "someone who loves children"; however, those priests who abuse children, boys and girls, ranging from fondling to rape sometimes followed by murder, do not do it because they love children, but only because they know they can take advantage of the weak and vulnerable. These predators are paedocriminals, period! SNAP [Survivors Network of those Abused by Priests], the association of victims of abuse by priests, now has over 12,000 members in 56 countries, which gives an idea of the scale of the phenomenon, which has nothing marginal about it.
Read more

Spotlight o il potere del giornalismo investigativo

“È molto difficile dire di no a Dio”, spiega la vittima di un prete “pedofilo” intervistata da una giornalista del Boston Globe che fa parte del team investigativo Spotlight da cui deriva il titolo del film di Tom Mc Carthy uscito nelle sale dei cinema il 27 gennaio di quest’anno negli Stati Uniti e che si può vedere in tutti gli angoli del pianeta.  
Un impeccabile film hollywoodiano che ricostruisce il più fedelmente possibile la lunga inchiesta condotta da questi giornalisti su un tema alquanto sensibile, ovvero la protezione offerta per tre decenni dal cardinale-arcivescovo di Boston, Bernard Law, ai preti della sua diocesi colpevoli di abusi sessuali di bambini. I giornalisti nel 2003 per la loro inchiesta hanno ottenuto il Premio Pulitzer. Il film che li ha messi in scena, al giorno d'oggi ha sbancato ben 9 premi, iniziando con l’Oscar per il miglior film, e ne otterrà sicuramente degli altri, in particolare al prossimo Festival di Cannes.
La religione e il sesso sono due temi tabu, che si sa bene non hanno nulla a che vedere l’uno con l’altro. E ogni volta che si incontrano, si ottiene un risultato esplosivo.
Continua a leggere

Spotlight oder die Macht des investigativen Journalismus

„Gott nein zu sagen fällt schwer“, erklärt das Opfer eines „pädophilen“ Priesters, in einem Interview durch eine Journalistin des Ermittlungsteams Spotlight des Boston Globe, nach dem der Film von Tom Mc Carthy betitelt ist. Dieser kam am 27. Januar dieses Jahres in den US-Kinos heraus und kann nun weltweit gesehen werden.
Ein tadelloser Hollywoodfilm, der so wahrheitsgetreu  wie möglich die langzeitige Recherche rekonstruiert, die von diesen Journalisten über dieses so heikle Thema geführt wurde. Es ging um den dreißigjährigen Schutz, den der Kardinal und Erzbischof von Boston, Bernard Law den Priestern seiner Diözese gewährleistete, die sich die sich des sexuellen Missbrauchs an Kindern schuldig gemacht hatten. 2003 erhielten die Journalisten für ihre Recherchearbeit den Pulitzerpreis. Der Film über sie hat schon 9 Preise gewonnen. Der erste davon war der Oscar für den besten Film. Mit Sicherheit wird er noch andere Preise gewinnen, vor allem beim kommenden Festival von Cannes.
Es ist allgemein bekannt, dass Religion und Sexualität sind Tabuthemen und haben wie bekannt nichts miteinander zu tun. Und jedes Mal, wenn sie sich treffen, knallt es.
Weiterlesen

Spotlight ou le pouvoir du journalisme d’investigation

“C’est très difficile de dire non à Dieu“, explique la victime d’un prêtre “pédophile” interviewée par une journaliste du Boston Globe faisant partie de l’équipe d’enquête Spotlight, qui donne son titre  au film de Tom Mc Carthy sorti en salles ce 27 janvier 2016 aux USA et qu’on peut voir aux quatre coins de la Grande bleue.
Un impeccable film hollywoodien qui reconstitue le plus fidèlement possible l’enquête au long cours menée par ces journalistes sur un sujet très sensible: la protection offerte pendant une trentaine d’années par le cardinal-archevêque de Boston, Bernard Law, aux prêtres de son diocèse auteurs d’abus sexuels sur des enfants. Si les journalistes de Spotlight ont obtenu en 2003 le Prix Pulitzer pour leur enquête, le film les mettant en scène a raflé 9 prix à ce jour, à commencer par l’Oscar du meilleur film, et en décrochera sans doute d’autres, notamment au Festival de Cannes.
La religion et le sexe, deux thèmes tabous qui, c’est bien connu, n’ont rien à voir l’un avec l’autre. Et chaque fois qu’ils se rencontrent, le résultat est explosif.
Le monde “civilisé”, qui est tellement choqué par la barbarie primitive du “Jihad alnnikah “ de “l'État islamique”, a beaucoup de mal à regarder en face ses propres turpitudes, comme par exemple ce qu’on appelle à tort les prêtres pédophiles. Pédophile veut dire "qui aime les enfants"; or, ces prêtres qui abusent d'enfants, garçons et:ou filles, allant des attouchements aux viols avec pénétration parfois suivis de meurtre, ne le font pas parce qu'ils aiment les enfants, mais uniquement parce qu'ils savent pouvoir profiter des plus faibles et vulnérables. Ces prédateurs sont des pédocriminels, point barre. SNAP, l’association de victimes d’abus commis par des prêtres, compte aujourd’hui plus de 12 000 membres dans 56 pays, ce qui donne une idée de l’ampleur du phénomène, qui n’a donc rien de marginal.
Tout comme l'État islamique qui manipule des jeunes Arabes démunis pour les recruter au Jihad, ces prêtres s’en prennent aux plus pauvres et marginalisés dans la société pour en tirer profit. “Quand on est pauvres à Boston la religion  joue un rôle très important dans notre vie… Les prêtres repèrent les plus pauvres et les plus vulnérables comme victimes pour s’assurer qu’ils diront rien”.
Les révélations du Boston Globe à partir de janvier 2002 ont eu un véritable effet boule de neige et conduit à des révélations d’affaires similaires dans le monde entier, et pas seulement dans l'Église catholique, mais dans toutes les églises et, plus généralement, les organisations regroupant des enfants sous l’autorité d’adultes.
Comme le montre le scandale qui agite actuellement l'Église catholique de France, avec l’affaire du cardinal-évêque de Lyon Mgr. Barbarin, la haute hiérarchie s’est généralement comportée comme celle de Boston, en appliquant les règles de l’omertà, la loi du silence de la mafia sicilienne. Le Boston Globe a brisé cette loi et donné l’exemple.
http://tlaxcala-int.org/upload/gal_13183.jpg
Une leçon de journalisme
Spotlight devrait entrer dans les programmes d’enseignement de toutes les écoles de journalisme et formations aux médias citoyens. Tout d’abord, les journalistes de Spotlight ne sont pas des supermen ou superwomen, mais des Bostoniens ordinaires amateurs de base-ball. Ensuite, ce sont des bosseurs et des bosseuses qui pratiquent la journée de travail de 15 heures et ne fréquentent les cafés que pour y rencontrer des témoins. Ils sont habités par un seul souci : rechercher la vérité. Mais cela ne leur fait jamais oublier qu’ils doivent veiller à la protection de leurs sources, à commencer par les victimes qui acceptent de témoigner, et auxquelles ils manifestent une empathie qui n’est pas feinte. Et ils savent être patients, prendre leur temps et s’adapter aux temps de leurs sources. Ils sont conscients que la publication prématurée de résultats partiels de l’enquête pourrait ruiner les efforts pour découvrir toute l’étendue de l’affaire. Ainsi, ce qui était au départ une enquête sur un prêtre criminel s’étend à 7, puis 13, puis 90 prêtres dans le seul diocèse de Boston, qui ont fait plus de 1 000 victimes.

En publiant ses révélations, dans plus de 600 articles en un an, le Boston Globe a montré que la force de ce quatrième pouvoir que sont les médias peut venir d’autre chose que du scoop, du buzz, du scandale à tout prix, mais plutôt de la parole des plus faibles, des sans-voix et ce faisant, il a pu gagner une bataille contre ce deuxième pouvoir redoutable qu’est l'Église catholique à Boston, où les catholiques constituent pratiquement la moitié de la population. Mais cette bataille ne concerne pas que les catholiques.
Partout où les pauvres survivent dans l’ignorance, leurs enfants sont une proie de choix pour les prédateurs assoiffés de pouvoir qui abusent d’eux et les réduisent au silence au nom d’une entité supérieure, en général un Dieu. La leçon de Boston a donc une portée universelle.
Une version modifiée de cet article a été publiée sur le site Nawaat
 

lundi 21 mars 2016

Pourquoi on devrait toutes aimer Hédi

Grande nouvelle les filles. Le Tunisien nouveau est arrivé ! Il s’appelle Hédi. Pour le moment, ce n’est qu’un personnage imaginaire, incarné par le héros de Berlin, Majd Mastoura, mais…
Le cinéma, depuis qu’il existe, offre un miroir à la société. Parfois déformant, parfois grossissant, parfois rapetissant. Les œuvres géniales sont celles qui arrivent trop tôt, les médiocres sont celles qui arrivent trop tard, les œuvres d’art sont celles qui arrivent au bon moment. Nhebbek Hedi [ Je t’aime, Hédi], le film de Mohamed Ben Attia, est entre la première et la troisième catégorie. Le public tunisois de la première n’a pas eu l’air de beaucoup l’apprécier, certains se demandant si les prix raflés à la Berlinale étaient dus à la présence de touristes allemands dans le film. Outre sa stupidité, cette remarque permet de mettre le doigt là où le film fait mal.

jeudi 17 mars 2016

“Aziz Rouhou” : le désarroi d’une spectatrice

Narcisse voulait traiter à la fois de l’homosexualité, de la détresse conjugale, du divorce, de la violence et de la folie conjugale, de l’intégrisme religieux, de l’amour passionnel, de l’émancipation de la femme, de l’amour et de la crise du théâtre. C’est vrai que tout ça pourrait faire un beau tableau, mais vous ne pensez pas que c’est un peu trop pour un seul film ? Surtout avec un tel scénario ?
Sonia Chamkhi, un nom récurent dans le monde du cinéma. On pouvait s’attendre à un film digne de votre parcours, mais je suis ressortie de la salle de cinéma sans qu’aucune scène de votre film Aziz Rouhou (Narcisse) ne soit restée gravée dans ma tête. 90 minutes effacées.
lire la suite

mercredi 2 mars 2016

La vie des jeunes homosexuels en Tunisie : un enfer fait de violence sans fard et d’hypocrisie

par Rim Ben Fraj, 2/3/2016 
Actualisation du 5/3/2106:
La cour d'Appel a confirmé la condamnation des six jeunes, mais l'a réduite de trois ans à un mois (le temps qu'ils ont passé en détention préventive), assorti de 400 dinars d'amende. Elle a annulé l'interdiction de séjour de 5 ans à Kairouan ainsi que la condamnation de l'un d'eux à six mois de prison pour attentat à la pudeur. La bataille judiciaire n'est pas finie. Prochaine étape : la Cour de Cassation.
Je suis assez âgée pour avoir une idée de la répression contre les dissidents sous la dictature de Ben Ali et après. Jusqu’ici je me croyais bien informée. Mais ce que je suis en train de découvrir dépasse tout ce que je pouvais imaginer. La réalité dans laquelle les jeunes hommes homosexuels essayent de survivre est tout simplement effroyable.
Alors que les jeunes dissidents soumis à la répression pouvaient et peuvent compter sur le soutien société civile, de leur familles, et de leur entourage, les jeunes miboun ou karyouka (deux des innombrables termes péjoratifs pour designer les “ pédés “ en arabe tunisien) sont presque tout seuls pour essayer de se défendre*.
Tout d’abord ils risquent de lourdes peines de prison pour ce que le code pénal appelle “sodomie”. Le sinistre article 230, l’un des plus courts et ramassés du code pénal stipule: “la sodomie (entre adultes consentants) est punie de 3 ans de prison”.

Comme il est difficile de prendre les délinquants en flagrant délit, reste à prouver ce dont on les accuse. La solution s’appelle “ test anal”, en d’autres termes une forme universellement condamnée, dégoûtante et absurde de torture, qui de fait n’apporte pas plus de preuves que les fameux tests de virginité pour les femmes, Des médecins de la santé publique se rendent complices de cette grave violation des droits humains. Les jeunes hommes soumis à ce traitement commencent ainsi un long chemin de croix qui ne peut se comparer qu’aux ordalies médiévales en Europe.

Fils: “Papa, j'ai entendu que, maintenant, les gays ont le droit de se marier aux USA. Mais qu'est-ce que ça veut dire, "gay"?
Dessin d'Andeel, Égypte

mardi 9 février 2016

Chroniques d'une insoumise [2]

Chapitre 2

Chers (é)branlés,

On vit dans une société où la fierté des hommes c’est leur queue, où on entend le mot « zebbi » en moyenne une dizaine de fois par jour, ces hommes « pleins de virilité » se permettent d’uriner en pleine rue pour le démontrer.

La règle  : 
Lorsqu’on est harcelée par un homme, si on se défend on est traitée de pute, à la limite on se transforme en fille perverse qui provoque les hommes et les harcèle.
Lorsqu’un homme harcèle une femme et qu'elle réagit exactement avec les mêmes mots qu’il vient de prononcer, il se sent touché dans son honneur, le sang lui monte à la tête et il se permet de sortir toutes les merveilles misogynes de sa bouche et elle doit s’estimer chanceuse si elle n’a pas été agressée physiquement.  

L'exception :
Je rentre avec ma sœur de 20 ans de Lafayette au centre-ville vers 9 heures du soir, une bande de garçons dans une bagnole louée commencent à nous emmerder au niveau de la rue de Marseille.
Dès qu’ils nous ont repérées ils ont ralenti :
Un garçon sort sa tête de la fenêtre et il commence à nous appeler : psssssssssssssssssssssssssssssssst psssssssssssssssst.
Moi j’ai rapidement répondu : "C’est dépassé ça ! On t’a pas appris des nouvelles manières ?"
Ils accélèrent et arrêtent la bagnole le long du trottoir pour me répondre :
-« ya 5amja », sale pute
 Fatoum se précipite et elle rétorque :
-Maudit
Ils commencent tous à dire des gros mots, il y a un vieil homme derrière nous et un jeune homme qui passe, j’ai tout de suite rebondi :
-Bravo les garçons vos parents seront fiers de vous.
Puis on ne les voit plus, ils sont disparus,; après 100 mètres Fatoum s'arrête pour acheter un Mlaoui, à ce moment les 5 réapparaissent, à pieds, le même qui parlait de la fenêtre, qui avait à peine 20 ans, s’est adressé à moi et il a levé son main pour me dire :
-Tu me dis pas des gros mots, tu comprends !!
Il m’a totalement étonnée parce que je n’avais prononcé aucun gros mot ! J’ai tout de suite répliqué :
-Moi j’ai dit des gros mots ? Quand ça ??
Le garçon des mlaouis nous regardait, choqué. J’ai repris :
- Pour ton info, moi, je n’ai pas besoin de dire des gros mots pour me défendre, et puis ces garçons nous poursuivent depuis tout à l’heure !
Ses copains ont rebondi et ils ont commencé à nous crier dessus :
-Vous êtes des mauvaises filles, vous dites des gros mots
J’ai répondu en criant :
-Tu te permets d’insulter ma mère et tu ne veux pas qu’on te réponde ? Ta mère est plus précieuse que la mienne ou quoi ?
Le chauffeur a avancé et il avait l’intention de m’agresser mais ses copains l’ont empêché de m’agresser, ils me disent de me calmer et que ça se fait pas que je crie et que je réponde, mais lui, il a insisté et il s'est mis à crier qu’ils allaient nous arracher par les cheveux et nous massacrer pour nous punir. Là Fatoum a crié :
-Écoutez, vous venez d’ailleurs vous êtes dans mon quartier je n’ai pas peur de vous, si vous essayez de me toucher ou que vous touchez ma sœur, vous allez le regretter pour la vie, revenez là ou d’où vous venez, bande de cons.
Un mec du quartier m’a demandé :
-Tu es sûre que tu vis ici ?
Et puisque j'étais  sur les nerfs j’ai répliqué avec un ton fort :
-Mais bien sûr que je suis d’ici !
Il a hurlé :
-Pourquoi tu me réponds de cette manière, je voulais te défendre mais va te faire voir!
Moi avec un ton déterminé :
-Tu m’aides pas je n’ai pas besoin de ton aide, si tu as envie d’aider tu ne me poses pas des questions débiles déjà et puis on s’est bien défendues.
Le mlaoui était prêt et les gens étaient stupéfaits de notre attitude, on est parties en répétant : on n’a pas besoin de votre aide !
Des mecs s'exclamaient:
- Bravo, vous pensez que vous êtes braves comme ça.
- Vous n’avez pas besoin d’aide, hahahaha
- Quel courage, vous êtes tout simplement mal élevées.

Lorsque on est rentrées, on a tout raconté à notre mère, qui a dit : oui, c'est normal, vous rentrez à cette heure-ci...
Morale de l’histoire :
1-Ne ne pas sortir après la tombée de la nuit!
2-Ne jamais sortir sans homme!
3-Si vous sortez, déguisez-vous en Ninja, avec niqab intégral et rasez les murs
4-Sortir quand et où vous voulez et répondre du tac au tac. C'est risqué, mais ça paye.

jeudi 28 janvier 2016

Chroniques d’une insoumise [1]

Chapitre 1

Chers amis, amants, ex, sex-friends, et autres passés, futurs et en cours


الشرف يملكه الرجل، أما المرأة فلا شرف لها، هى فقط الجسد أو المكان حيث يكون شرف الرجل، ولكن
كيف يتعلق شرف الرجل بجسد المرأة وليس بجسده هو؟ ولماذا يتعلق الشرف بالجسد فقط ولا يتعلق بالعقل؟
نوال السعداوي





Il y a deux genres de filles : celles qui cèdent à leurs parents-copains-maris ou frères et qui se spécialisent dans le mensonge et le compromis ; elles sont persuadées que ça ne fonctionne pas autrement et que les hommes sont faits pour être les patrons de leurs vies. Ces nanas essayent de vivre dans une paix illusoire en menant une double vie.

Le deuxième genre, ce sont les déchainées, rebelles et emmerdeuses : elles refusent de mener une vie de schizophrènes, elles refusent de mentir ou céder à la main de fer patriarcale ; elles ont choisi le chemin le plus difficile, armées de leur seule détermination, elles font en permanence face à des situations compliqués, avec le risque d’être agressées par leurs parents ou frères, quittées par leur copains et enfin rejetées par la société misogyne.

Conversation entre deux inconnus dans une BMW coincée rue de Palestine à l’heure de pointe, 18h:
-« J’ai 2 solutions ou bien la tuer et aller en prison ou bien la tuer et aller en prison», crie le premier à son copain qui conduit
-Mais laisse tomber, c’est une pétasse (ق***), tout le monde a profité d’elle, ya khouya, tu mérites mieux que ça, tu mérites une petite fraiche (نظيفة عفيفة) digne de ta famille et de ton honneur !

1ère Conversation type:

-Allo chéri, je vais regarder un film /une pièce avec mes copines
-J’ai peur pour toi, chérie, ne tarde surtout pas, tu sais quoi je t’appellerai dans une heure pour que tu n’oublies pas et que tu rentres
Entretemps 15 appels en absence sur le téléphone en mode silencieux au fond du sac
-Allô chéri, tu m’as appelé ….
-Mais pourquoi tu me répondais pas, tu faisais quoi alors, tu es avec qui maintenant ?!!!!
-Le téléphone était en silencieux et puis je ne pouvais pas répondre
-Tu pourrais au moins me texter
-Mais je regardais le putain de film !
A ce moment, un vieux copain passe : salut X., ça va !! oui çavaaaaa !! mouaah ( bisous )
-Tu m’a pas encore répondu, dis donc, il y'a qui avec toi? tu m’as menti, tu es avec ton autre bien-aimé alors?!  (صاحبك الاخر)
-Mais je viens de sortir et j'ai croisé Y.
-Bon bon, tu vas rentrer tout de suite là ?
-Justement on pensait aller boire un café et discuter du film
-Ah nooooon, j’aime pas quand on me ment, tu es déjà au café tu m’as pas avisé !!
-Tin tin tin

2ème conversation type:

-Tu comptes faire quoi cet après-midi, chérie
- J’ai un RDV avec XX. pour le projet ZZ.
-Chérie, je ne veux pas que tu restes toute seule avec lui, mais est-ce que tes parents et ton frère le savent, que tu vas chez un vieux qui vit seul, avec ta copine et ta copine, c'est normal ? Elle n’as pas des parents, elle aussi ?
-Oui mais elle, elle travaille avec lui depuis longtemps et puis dans le même appart il y a le bureau et le domicile.
- Écoute, ça ne se fait pas que 2 filles aillent chez un homme seul et étranger en plus, ça se fait pas du tout.

3ème conversation type:

-Chéri, je vais sortir avec mes collègues de travail et des vieux copains pour boire un coup je te rappelle plus tard, bisous.
-Ah non, ce n’est pas possible, tu ne bois qu’avec moi, c’est clair ? Et ça se voit que t’as programmé ça depuis longtemps pour être seule avec tes amants.
-Mais c’est juste un apéro, je ne vais pas me saouler puisque je rentre après chez mes parents.
-Je sais que tu ne te contrôle plus quand tu es alcoolisée, chérie, tu deviens ouverte à toute proposition,  j’te connais moi, ils vont profiter de toi.

4éme conversation type:

-Papa je vais tarder ce soir
-Ah bon ! Pourquoi ?
- On va fêter la remise du rapport
- Mais où et avec qui et jusqu’à quand ?
- Mais Papa avec mes collègues de travail notre patron, toute l’équipe quoi !
-J’veux pas que tu rentres le soir tard, les voisins vont te prendre pour une belly dancer (راقصة)!!! On a des voisins,  il faut qu’on se respecte, ma fille, tu le sais ça !

Toutes les femmes citées ont passé les trente ans...


Les nanas se trouvent donc obligées de faire avec et de supporter les coups de fil répétitifs, de répondre aux questionnaires interminables et expliquer, ré expliquer que c’est rien, et que ce mec est juste un vieil ami, que l’autre est juste un collègue. D’autres nanas, par contre, ne réussissent pas à le faire vu qu’elles ne sont pas dans la logique du compromis.
Des mecs qui se comportent de cette manière ont des sérieux problèmes de confiance en soi, ce qui les rend incapable de faire confiance à leurs copines.
Il est tout à fait normal de s’attendre de ce genre de comportement vu qu’on est dans une société patriarcale bien qu’on prétende être moderne mais à l‘intérieur de chaque homme « zâama » libéré on trouve un barbu qui se permet de boire avec sa copine mais qui ne peut pas se permettre d'accepter que sa copine boive un coup avec qui que ce soit d'autre sous le prétexte qu’elle ne se contrôle plus lorsqu'elle boit de l’alcool.
Cette soif de contrôle sur les femmes est le résultat de leur incapacité totale à contrôler la situation actuelle, que ce soit la situation générale ou la leur propre : ils se sentent donc obligés de cherche le noyau le plus faible (nous les filles-femmes, les femmes-filles) de la société, qui est en train de s’épanouir en matière d’éducation de culture et de pouvoir, et de faire de nous des handicapées lourdes, à coups de comportements misogynes. Pour notre malheur, et pour le leur, aussi.



à suivre

mardi 26 janvier 2016

Tunisia, January 2016: a people under house arrest

By Rim Ben Fraj, 22/1/2016. Translated by Jenny Bright, edited by Fausto Giudice, Tlaxcala
I was not yet born in January 1984*. They didn't tell us about it in school. But fortunately our Father of the Nation wanted to give us a history lesson by making us relive the days of January 84 when hundreds of citizens were killed by the same forces of disorder which for five days had spread, shooting and bludgeoning around the deep, forgotten country. He chose - or it was chosen for him - the same office, to speak tonight to the people, as that from which the Supreme Fighter** had addressed his unruly children.
Read more 

Tunisia, gennaio 2016: un popolo agli arresti domiciliari

di Rim Ben Fraj, 22/1/2016. Tradotto da Milena Rampoldi, editato da Fausto Giudice, Tlaxcala 
Nel gennaio del 1984* non ero ancora nata. E a scuola nessuno ce ne aveva parlato. Ma fortunatamente il “padre della nazione” ci ha impartito una lezione di storia, facendo rivivere i giorni del gennaio del 84, quando le forze di insicurezza hanno massacrato centinaia di cittadini. E si tratta delle stesse forze di insicurezza che da una settimana, nel profondo del paese dimenticato, sparano sulla folla e la picchiano con i manganelli. Per il suo discorso il presidente ha scelto esattamente lo stesso ufficio – o forse lo hanno scelto per lui – per rivolgersi al popolo venerdì sera che a sua tempo aveva scelto il “Combattente supremo” [Mudjahid Al Akhbar, come si chiamava ufficialmente il despota Habib Bourguiba] per rivolgersi al popolo con un discorso*.

Tunesien, Januar 2016: ein Volk unter Hausarrest

von Rim Ben Fraj, 22/1/2016. Übersetzt von Milena Rampoldi, herausgegeben von Fausto Giudice, Tlaxcala
Im Januar 1984* war ich noch nicht geboren. Und in der Schule hat man uns nichts davon erzählt. Aber glücklicherweise hat uns der „Vater der Nation“ einen Geschichtsunterricht erteilt, indem er die Tage vom Januar 84 aufleben ließ, an denen Hunderte von Bürgern durch dieselben Unsicherheitskräfte niedergemetzelt wurden, die seit einer Woche in allen Ecken des in Vergessenheit geratenen, tiefen Teils des Landes schießen und mit Knüppeln um sich schlagen. Er hat für seine Ansprache genau dasselbe Büro gewählt – oder vielleicht hat man es für ihn ausgesucht – um sich am Freitagabend ans Volk zu wenden, aus welchem sich damals der „größte Kämpfer“ (Mudschahid Al Akhbar, wie der Despot Bourguiba offiziell genannt wurde) an seine unruhigen Kinder gewandt hatte*. 

lundi 25 janvier 2016

Túnez, enero de 2016: un pueblo bajo arresto domiciliario

por Rim Ben Fraj, 22/1/2016 Traducido por  María Piedad Ossaba, Tlaxcala
En enero de 1984* aún yo no había nacido. En la escuela no nos dijeron nada sobre ese periodo. Pero por suerte nuestro Padre de la Nación  quiso darnos una lección de historia haciéndonos revivir las jornadas de enero del 84 donde cientos de ciudadanos fueron masacrados por las mismas fuerzas del desorden que, desde hace una semana, disparan y aporrean en los cuatro rincones del país profundo, del país olvidado. Escogió - o se le escogió - la misma oficina, para dirigirse  esta noche al pueblo, desde la que el Luchador Supremo** se había dirigido a sus  ingobernables hijos.

Ahora, Habib Bourguiba se reencarnó en la piel de Béji Caïd Essghrir ("El Pequeño", como Víctor Hugo había apodado a Napoleón III "Napoleón El pequeño", en relación a su tío Napoleón I) tratando de revivir un poco del carisma de su jefe desaparecido. Lamentablemente es incapaz de convencer. Aún peor, por la edad (89 años), nuestro dinosaurio ya no es capaz de recordar las frases que  pronunció unos instantes antes. Resultado: un discurso vacío, repetitivo, balbuceando mentiras e historias internas del partido, de las que el pobre pueblo amenazado cada noche en los platós de TV por tombos*** politiqueros y politiqueros tombos que se presentan como sus salvadores contra el terrorismo, le importa un bledo. Todos dicen que no han querido utilizar la fuerza hasta ahora pero que estarán obligados a hacerlo si "esto" continua. Esto, es la intifada para TRABAJO JUSTICIA y DIGNIDAD, que comenzó en Kasserine el 17 de enero.
 Leer más

vendredi 22 janvier 2016

Tunisie, janvier 2016 : un peuple assigné à résidence

Je n'étais pas née en janvier 1984. On ne nous en a pas parlé à l'école. Mais heureusement notre Père de la Nation a voulu nous donner une leçon d'histoire en nous faisant revivre les journées de janvier 84 où des centaines de citoyens furent massacrés par les mêmes forces du désordre qui, depuis 5 jours, tirent et matraquent aux quatre coins du pays profond, du pays oublié. Il a en effet choisi - ou on a choisi pour lui - le même bureau, pour s'adresser ce soir au peuple, que celui à partir duquel le Combattant Suprême s'était adressé à ses enfants turbulents.



Désormais,  Habib Bourguiba s’est réincarné dans la peau de Béji Caïd Essghrir (comme Victor Hugo avait surnommé Napoléon III "Napoléon Le Petit", par rapport à son oncle Napoléon Ier) en essayant de ressusciter un peu du charisme de son chef disparu. Malheureusement il est incapable de convaincre. Encore pire, à cause de l’âge (89 ans), notre dinosaure n’est plus capable se souvenir des phrases qu'il a prononcées quelques instants plus tôt.  Résultat : un discours vide, répétitif, bafouillant des mensonges et des histoires internes du parti, dont le pauvre peuple, menacé chaque soir sur les plateaux de télé par des flics politicards et des politicards flics  qui se présentent comme ses sauveurs contre le terrorisme, se fout complètement. Ils disent tous qu'ils n'ont pas voulu utiliser la force jusqu’à maintenant mais qu'ils seront obligés de le faire si "ça" continue. Ça, c'est l'intifada TRAVAIL JUSTICE DIGNITÉ, qui a commencé à Kasserine il y a 5 jours.


Assignés à résidence par un couvre-feu de 20h à 5heures, nous voilà condamnés à zapper : on a le choix entre Borhène Bsaies, Mariem Belkadhi et Mohamed Booughalleb, les trois manipulateurs-en-chef. Ils sont là, sur les plateaux,  pour appuyer et justifier tous le discours des flics invités, et en rajoutent, nous ressortant la fameuse " main invisible" qui tire les ficelles des révoltes, menaçant la stabilité (?) et la prospérité (?) du pays. Et voilà les chômeurs, diplômés ou non, transformés en marionnettes diaboliques, en petits chitanes, qu'il faut écraser. C'est tellement gros qu'on se demande s'ils sont aussi cons que ça, en nous prenant pour des cons.
Nous connaissons ces discours par cœur, depuis l’ère de Ben Ali durant les premiers souffles de la révolution tunisienne et partout dans le monde, chaque fois que les gens se soulèvent contre l’injustice.

Nous sommes un peuple assigné à résidence : non seulement, la grande majorité d'entre nous ne peuvent pas sortir du pays, mais encore nous ne pouvons même plus sortir de nos domiciles, condamnés à avaler la propagande des télévisions couvreuses de feu. Et à regarder dans nos frigos, que nous n'avons pas volés, s'il reste quelque chose à manger.
Qui pillait les magasins en janvier 2011 ? Un petit rappel pour les amnésiques

samedi 16 janvier 2016

As I open my eyes: a film against amnesia and nostalgia

You may shoot me with your words,
You may cut me with your eyes,
You may kill me with your hatefulness,
But still, like air, I’ll rise.
Maya Angelou, I'll rise
Translated from French into English by Jenny Bright, Tlaxcala

On these days of the fifth anniversary of the flight of General Ben Ali, the only event worth mentioning, before the flare-up of youth in the "other Tunisia" started on Jannuary 17th, was the Tunisian premiere of Leyla Bouzid's first feature film As I open my eyes, screened in the capital and major cities of the country from January 13th, 2016.
For her first feature film, the 31 year old director achieved a master stroke, worthy of awards in the last Carthage Film Festival and a series of festivals. The title of the film, As I open my eyes (Ala halet aini), is that of its title song*, sung by the protagonist Baya Medhaffar, Farah in the film.
We are in the summer of 2010, pending the results of the Baccalaureate exam which Farah, 18 years old, will pass with distinction. Her mother wants her to study medicine. Farah is not on the same planet: music is her thing, and she practices with the group Joujma, whose leader Borhène is her first love.
The group plays in the bars of Tunis and its suburbs, where beer drinkers appreciate their mezzoued rock and subversive lyrics. Hayet, the mother, played by singer and graphic designer Ghalia Ben Ali in her first major screen role, does not agree with the path taken by Farah, which causes in her a justified anxiety.
Subsequent events prove she had a reason to worry, but she will eventually follow the path of her daughter in what the director calls a "reverse transmission".




jeudi 14 janvier 2016

À peine j’ouvre les yeux : un film contre l’amnésie et la nostalgie

You may shoot me with your words,
You may cut me with your eyes,
You may kill me with your hatefulness,
But still, like air, I’ll rise.
Maya Angelou, I'll rise

En ces jours de 5ème anniversaire de la fuite du général Ben Ali, le seul événement digne d’être mentionné, avant l'explosion de colère de la jeunesse de "l'autre Tunisie" à  partir du 17 janvier, était la première tunisienne du premier long métrage de Leyla Bouzid À peine j’ouvre les yeux, projeté dans la capitale et les principales villes du pays depuis le 13 janvier 2016.

Pour son premier long métrage, la jeune réalisatrice 31 ans a réalisé un coup de maître,  digne des récompenses décernées lors des dernières Journées cinématographiques de Carthage et dans une série de festivals. Le titre du film,  À peine j’ouvre les yeux (Ala halet aini), est celui de sa chanson phare*, chanté par la protagoniste Baya Medhaffar, Farah dans le film.
Nous sommes dans l’été 2010, dans l’attente des résultats du Bac Farah, 18 ans va l’obtenir avec mention. Sa mère veut quelle étudie la médecine. Farah n’est pas sur la même planète : elle, son truc, c’est la musique qu'elle pratique au sein du groupe Joujma, dont le leader Borhène est son premier amour.
Le groupe se produit dans des bars de Tunis et banlieue, ou les buveurs de bière apprécient son rock mezzoued aux textes subversifs. Hayet, la maman, interprétée par la chanteuse et graphiste Ghalia Ben Ali dans son premier grand rôle à l’écran, n’est pas d’accord avec le chemin emprunté par Farah, qui provoque en elle une angoisse justifiée.
La suite des événements donnera raison à son inquiétude, mais elle finira par suivre la voie tracée par sa fille dans ce que la réalisatrice appelle une « transmission inversée ».




5 ans après la fuite honteuse du dictateur la société tunisienne se trouve dans la situation de toutes les sociétés « post-totalitaires » : « Le vieux se meurt, le neuf n’arrive pas à naître » (Antonio Gramsci). L’essentiel des raisons de la révolte est toujours là mais maintenant on peut un peu plus facilement parler, créer, réfléchir.
Leyla Bouzid a mis 4 ans pour réaliser son film, prenant le temps d’en fignoler tout les aspects.  Et c’est une réussite, tant du point de vue du scénario, des dialogues, des cadrages, de l’éclairage que de la bande son, si importante dans un film centré sur un groupe musical.
Comme toute société post-totalitaire la société tunisienne navigue entre deux écueils : l’amnésie et la nostalgie, tous deux étroitement liés. C'est le rôle des artistes, notamment des cinéastes, de servir de poissons-pilotes dans cette navigation, pour renvoyer à leur société une image à distance/rapprochée qui déclenchera des émotions et une réflexion.. Par une approche décidément féminine de la corporéité, le film de Leyla Bouzid est sans doute le premier dans le monde arabe d’après le "Printemps" à donner a voir d'une manière à la fois si directe et si subtile l’enjeu fondamental des révolutions en cours : le contrôle des corps, en premier lieu celui des femmes. Les régimes despotiques ne peuvent se contenter de contrôler les esprits, ils doivent aussi contrôler les corps dans toutes leurs dimensions et expressions.
Dans la Tunisie de Ben Ali et d'après, les murs n’ont pas seulement des oreilles mais aussi des yeux. Une scène d’anthologie du film est celle ou Hayet, à la recherche de sa fille, entre dans un bar d’hommes. Les regards des clients la déshabillent dans un silence menaçant comme s'ils voyaient un être féminin pour la première fois de leur vie.
La révolution dans laquelle Farah entraine sa mère et leur bonne noire délurée du sud –personnage quasi obligatoire de tout film arabe mais ici revisité d’une manière révolutionnaire- est une révolution biopolitique, au sens étymologique : elle veut vivre. Ni survivre ni sous-vivre. Elle refuse spontanément, sans même y réfléchir, les compromis acceptés par sa mère et son père pour surnager dans l’étouffoir du 7 novembre. Elle le paiera d'une nuit d'interrogatoires policiers constituant une autre scène très forte du film, au cadrage très serré, qui en dit beaucoup plus que bien des rapports d'Amnesty International sur ce régime en voie de disparition.
Farah, Borhène, Inès et leurs amis sont emblématiques de toute une génération qui poursuit son chemin. Leurs esprits ont commencé à se libérer, il leur reste à libérer leurs corps et ceux de leurs parents.


À PEINE J'OUVRE LES YEUX
Tunisie, 2015, 102 mn.
Réalisation  Leyla Bouzid
Scénario  Leyla Bouzid et Marie-Sophie Chambon
Musique originale  Khyam Allami
Paroles  Ghassen Amami
Image  Sébastien Goepfert
Montage  Lilian Corbeille
Son  Ludovic Van Pachterbeke 
Fiche artistique
Farah Baya MEDHAFFAR
Hayet  Ghalia BENALI
Borhène   Montassar AYARI
Ali Aymen OMRANI
Mahmoud Lassaad JAMOUSSI
Inès  Deena ABDELWAHED
Ska  Youssef SOLTANA
Sami  Marwen SOLTANA


*À PEINE J'OUVRE LES YEUX

(Texte de Ghassen Amami)
Quand je vois ce monde
de portes fermées,
je m'enivre et ferme les yeux.
Alors à chaque fois,
une fille m'apparaît.
Parfois, elle semble être la même,
finalement, c'en est une autre.

Dans mon esprit,
son image est mouvante :
Un œil fleuri et un autre fané,
bleus ciel,
qui virent au vert à la lumière,
noirs, noisettes, colériques,
rayonnants, souriants…

A peine j'ouvre les yeux,
je vois les gens privés
de travail, de bouffe,
et d'une vie hors de leur quartier.
Méprisés, dépités,
dans la merde jusqu'au cou,
ils respirent par leurs semelles.

A peine j'ouvre les yeux,
je vois des gens qui s'exilent,
traversant l'immensité de la mer,
en pèlerinage vers la mort.
De la galère du pays,
les têtes perdent l'esprit,
cherchant une galère nouvelle,
que celles déjà vues.

A peine j'ouvre les yeux,
je vois des gens éteints,
coincés dans la sueur,
leurs larmes sont salées,
leur sang est volé
et leurs rêves délavés.
Sur leur dos,
on construit des châteaux.